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Toujours l’élec, même pour les VU

Autour d'Alain Gazo, de g.à d. Frédéric Michard (TotalEnergies), Guillaume Bray (Enedis),
Pascal Merle (Optixt), Alexandre Nepveu (Orange) et Thibaut Macé (Renault).

Le parc automobile demeure un sujet majeur dans les entreprises, à la fois en matière budgétaire, de gestion des RH et de RSE. La fiscalité et la législation fluctuantes complexifient la donne. Et de ce point de vue, nous sommes gâtés. A ce propos, on évoque un possible assouplissement de certaines normes européennes, en particulier la fin de la livraison de véhicules thermiques en 2035. Cette éventuelle inflexion va-t-elle changer la donne ? Nous en avons débattu avec cinq spécialistes du secteur automobile, dont deux gestionnaires de grandes flottes, le 29 avril dernier.

Quel est le contexte en ce quasi milieu d’année ? Thibaut Macé évoque un marché automobile d’entreprise encore difficile. Globalement, après un retrait en flottes de 7 % en 2024, le premier quadrimestre a suivi cette courbe. L’incertitude liée à des décisions budgétaires tardives, parfois même rétroactives, a tendance sans doute à freiner les renouvellements. Cependant, les évolutions franches connues les années précédentes se confirment avec, souligne encore Thibaut Macé, une poursuite de la chute du diesel au profit d’abord de l’hybride-essence (50 % du total), mais aussi du pur électrique (14 % environ). Il est à noter que l’offre des constructeurs élargie facilite la montée en puissance du full electric en VP, mais aussi en VU, ce qui est plus nouveau. De ce point de vue, Renault est en pointe depuis longtemps, avec actuellement quatre VP full electric, dont récemment la R5, et bientôt la R4, mais aussi ses trois VU emblématiques - le Kangoo, le Trafic et le Master qui bénéficient chacun d’une version 100 % électrique. D’autres constructeurs s’y sont mis à leur tour. Dès lors, à la grande satisfaction de Guillaume Bray, très en pointe sur ce sujet avec Enedis, le VU électrique va pouvoir percer.

En effet, l’offre des constructeurs en élec, auparavant concentrée sur les fourgonnettes, s’étend désormais aux fourgons et même aux grands fourgons. « Et avec une autonomie intéressante, se réjouit Guillaume Bray, permettant aux véhicules chargés, et même tractant, de rouler jusqu’à 200/250 km/jour ». Cependant, constate Thibaut Macé, le diesel demeure prédominant dans les VU.

Qu’en est-il du TCO, interroge alors Alain Gazo, un TCO qui semblait encore il y a peu défavorable aux VU électriques ? La donne a changé, selon Guillaume Bray. Cela à la faveur de nouvelles évolutions fiscales dont celle remplaçant les bonus pour les entreprises par les certificats CEE qui sont davantage favorables au développement des VU électriques. De plus, les briques technologiques supplémentaires qui vont grever dans un proche avenir le coût de fabrication des véhicules thermiques contribueront encore à alourdir leurs prix de revient et donc à rééquilibrer davantage l’équation au profit de leurs cousins électriques, confirment en substance Thibaut Macé et Frédéric Michard.

La part des VU électriques devrait augmenter à l’avenir. Pour Enedis, « le presque 100 % sur les fourgonnettes et les moyens fourgons est possible », avec une progression assez rapide attendue dans les grands fourgons. Seuls les 4 x 4 devront rester thermiques, compte-tenu de l’environnement de leur utilisation. « Nous avons enfin une offre de VU digne de de ce nom et conforme à nos attentes », se réjouit de son côté Alexandre Nepveu. L’offre correspond aux attentes car, ajoute-t-il en substance, de plus en plus de véhicules électriques, comme chez Renault, sont conçus sur une base spécifique. En dépit donc de l’incertitude sur 2035, la voie électrique semble toute tracée. Et pourtant, le panorama des dispositifs incitatifs est très évolutif et contradictoire. Ainsi, le bonus pour l’achat de véhicules électriques dans les entreprises a-t-il disparu. Il a été remplacé par l’usage ad hoc du CEE (certificat d’économie d’énergie). Les avis à ce sujet sont partagés. Alexandre Nepveu l’estime « compliqué à mettre en place », devant la « variété des offres des émetteurs, et la difficulté à obtenir un agrément ».

Elec : une complexité à savoir gérer

Quoi qu’il en soit, le véhicule tout électrique se fraye un chemin, même si l’hybride non rechargeable - une solution perçue comme transitoire, tient actuellement le haut du pavé, et que le micro-hybride gagne actuellement du terrain. Qui dit véhicule électrique dit nécessité de recharger facilement. De ce point de vue, le nombre de bornes de recharge sur le territoire national a massivement augmenté ces dernières années. Frédéric Michard évoque ainsi 160 000 points de charge en France (120 000 l’an dernier), dont 26 000 - au lieu de 22 000, opérés directement par TotalEnergies.

« Toutes nos stations autoroutières sont équipées depuis fin 2024 », complète-t-il. « Et surtout avec des bornes HPC, permettant une recharge rapide de la batterie en 30-35 minutes, jusqu’au niveau de 80 % parfaitement acceptable », souligne-t-il. Actuellement, outre les stations autoroutières, celles opérant sur les noeuds de trafic continuent d’être équipées en HPC par TotalEnergies - 260 aujourd’hui et un objectif de 500. Pour les grandes flottes, comme celle de Enedis et de Orange, la recharge in situ progresse également. Chez Orange, Alexandre Nepveu mentionne ainsi 2 200 points de charge installés sur 300 sites. 1 000 supplémentaires vont s’y ajouter en 2025. On va encore plus loin chez Enedis, dont les exigences de métier sont différentes, avec un point de charge par véhicule sur sa base. Cependant, concède Guillaume Bray, 10 % de la recharge devra s’effectuer à l’extérieur pour les équipes en itinérance. D’où la nécessité de trouver des bornes sur leur parcours. Quant au temps que cela prendra, et suivant les situations, les techniciens peuvent travailler alors que leur véhicule charge, souligne-t-il encore. Le temps de charge est évidemment important face à un plein traditionnel par définition beaucoup plus court. Heureusement, les boîtiers télématiques embarqués facilitent la recherche des points les plus proches de notre parcours. « Nous équipons nos véhicules d’un planificateur de charge », signale à cet égard Thibaut Macé. Frédéric Michard indique de son côté que l’application My Card de TotalEnergies permet de connaître les localisations, les disponibilités.

Optimiser le parc

Si l’évolution vers le tout électrique se poursuit, ce qui permet de potentiellement diminuer la quantité de CO2 rejeté dans l’atmosphère, mais aussi le coût d’usage des véhicules, la politique de rationalisation des parcs se poursuit par d’autres moyens, ne serait-ce que par des changements d’habitudes d’utilisation « que l’épisode du covid a contribué à modifier », souligne Alexandre Nepveu. La montée en puissance du télétravail qui en est un des corollaires, accentue une évolution déjà perceptible auparavant. « Nous nous posons la question pour chaque collaborateur de la mise à disposition d’un véhicule sur toute une semaine », explique Alexandre Nepveu. De cette réflexion découlent des actions spécifiques chez Orange. Tout d’abord, et depuis plusieurs années, l’existence d’un parc en autopartage de 4 500 véhicules. « Et cela fonctionne bien », relate Alexandre Nepveu. Orange va même plus loin en favorisant le covoiturage privé domicile-travail, et même le covoiturage dans le cadre de l’autopartage. « C’est un enjeu très fort aussi chez Enedis, intervient Guillaume Bray, avec un parc de 1 500 à 2 000 véhicules dans le cadre de l’autopartage ». « Même certaines PME veulent aller vers l’autopartage », observe Pascal Merle. La rationalisation passe in fine aussi par une réduction de la taille des parcs. Tout simplement en raison du départ de salariés en retraite qui ne sont pas forcément remplacés, et également en vérifiant de près l’usage réel des véhicules.

A cet égard, l’obtention de nombreuses datas, via les boîtiers télématiques embarqués, facilite l’optimisation, affirment de concert Guillaume Bray et Alexandre Nepveu.

Des moyens de paiement et de contrôle

La rationalisation du budget lié à l’automobile passe aussi par la remise aux collaborateurs de cartes carburant appropriées. Elles leur permettent de régler leurs dépenses sans avoir à effectuer d’avances de fonds, mais aussi, suivant les options proposées par les émetteurs, de bien cerner les débours effectués, afin de corriger d’éventuelles dérives. Enedis a passé à cet égard un accord avec deux entreprises. TotalEnergies propose depuis de nombreuses années une carte Fleet permettant le règlement des enlèvements de tout carburant (essence, diesel et GNV, E85 et aussi recharge électrique). Sont possibles également le paiement de services associés tels que le lavage ou le parking dans de nombreux établissements partenaires. L’évolution de la puce insérée dans les cartes Fleet de TotalEnergies permet de bloquer certaines dépenses exclues de la car policy.